Yves Bongarçon

Il ne sera pas question ici d'attaquer ou torpiller Yves Bongarçon, ami personnel de Nicolas Sirchis (pendant un temps) décédé en 2019 à l'âge de 59 ans. Il était aussi connu sous le pseudonyme Whybee...

Cependant :

"Je rentrai donc au bureau et annonçai à l'équipe qu'on allait mettre Weezer en une.

Le lendemain, mon téléphone sonna, c'était Yves [Bongarçon] qui me demandait de passer le voir au quatrième étage, ce que je fis aussitôt. J'étais officiellement le rédacteur en chef de Rock Sound, lui était devenu celui de Rolling Stone, mais il gardait un oeil sur les affaires. 'Je sais pas si t'as remarqué mais les lecteurs de Rock Sound parlent vachement d'Indochine dans le courrier' me dit-il alors que je m'asseyais en face de lui. Il faut remettre les choses dans leur contexte. Nous étions au tout début des années 2000 et le groupe de Nicola Sirkis n'avait pas encore effectué le come-back qu'il s'apprêtait à faire. On était déjà revenu à une période de l'Histoire où le mot 'Indochine' évoquait plus la guerre (des années 1950) que le groupe (des années 1980). 'J'ai mangé avec les gens de Columbia à midi. ils nous déroulent le tapis rouge si on part sur la couv' Indochine. On va avoir accès comme on veut à Nicola pour qui il est super important d'avoir cette couverture'. Je ne disais rien mais j'étais un peu amer qu'il parle en disant 'on' au lieu de dire 'tu'.

Mais il ne me laissait pas le choix, il me sommait de trouver que c'était une bonne idée de mettre Indochine en couverture. C'est quand même lui qui m'avait embauché, et chaque mois depuis que j'étais à Freeway, c'est lui qui m'expliquait pourquoi on mettait tel ou tel artiste en couverture, alors qui aurais-je été, à essayer de remettre en question son avis sous prétexte que j'étais rédacteur en chef (depuis un mois), et en plus grâce à lui ? Bref je compris que j'allais devoir appeler Gilles chez Polydor pour lui annoncer que finalement, 'après conversation avec Yves', on allait plutôt mettre Indochine en couverture. Je n'eus pas besoin de lui expliquer que la décision était celle d'Yves, il le comprit tout de suite. Yves avait décidé qu'on mettrait Indochine en couverture. Son déjeuner avait tout simplement eu lieu en même temps que le nôtre et en quelque sorte, les choses décidées pendant le sien avaient plus d'importance que les nôtres."

Thomas VDB, Comedian Rhapsodie, Flammarion, 2021


Il est question ici du fameux Rocksound avec la une "Génération Indochine", et un long article/interview qui n'est pas autre chose qu'une publicité extrêmement grossière : on y voit un Nicolas mimant des poses rock et provoc, une attitude aussi stupide qu'impudente. Yves Bongarçon est à fond sur son pote.

Rocksound, avril 2002

"Qui en effet aujourd'hui aura l'outrecuidance d'affirmer en pinaillant et sans se ridiculiser que Indo n'est pas rock ?

Yves Bongarçon, Rocksound, avril 2002


Franchement, de quel côté est l'outrecuidance ? 

"Non seulement Paradize est l'un des meilleurs disques pop de l'année, tous genres confondus, mais il est aussi l'occasion pour Nicola Sirkis d'affirmer son retour sur le devant de la scène en adressant un message fort à tous les détracteurs de son groupe. Un beau bras d'honneur bien rock'n'roll. Bien joué !"

Yves Bongarçon, Rolling Stone, janvier 2003

Yves Bongarçon, Melissa auf der Maur, Nicolas Sirchis, Rocksound, 2002

Les gens qui ont eu la chance ou la malchance de travailler dans la musique savent que c'est comme dans la politique : de nombreux journaleux sont directement amis avec les musiciens et maisons de disques. Voilà comment on fabrique une légitimité et un succès. Voilà pourquoi les goûts et les couleurs, oui ça se discute et oui ça s'explique. Parce que l'opinion ça se travaille, parce que le cool est un produit, et parce que que les goûts ça se fabrique. À moins que vous ne soyez de droite, et à ce moment-là débrouillez-vous avec votre libre arbitre.

Le grand frère de Nicolas, auteur de Starmustang, s'épuisait déjà de telles situations avec ses amis personnels infiltrés dans la musique, et qui lui préparent le terrain :

"Le monde est petit. Partout où passe Nicolas, le terrain est miné."

Christophe Sirchis, Starmustang, 2009


Le très sympathique, cultivé et drôle Thomas VDB, de son vrai nom Thomas Vandenberghe et à qui on ne la fait pas (lui), avait déjà chroniqué le fameux concert (moyen, pas complet et au son volontairement durci) de Nîmes en 2000, en soulignant l'incongruité d'une association entre Indochine et Placebo. Sans se montrer particulièrement acerbe, Indochine ce n'est pas son truc, et ce n'est pas étonnant. Et non, cela ne fait pas de lui un ennemi.

Voir : Placebo, Ceux qui n'aiment pas Indochine.

Rappelons aussi que le lectorat de cette époque écoutait Korn, Linkin Park, Limp Bizkit, et qu'une époque où y'en avait que pour le rap et le r'n'b est une invention des deux cerveaux d'Indochine Mk2, assistés ici non pas d'un journaliste mais d'un publicitaire outrancier. Comme en 2021 avec le parpaing.

C'est drôle, de la part de gens qui ont fait "Popstitute" (un jeu de mots avec pop et prostitute) et font encore des doigts d'honneur à tout va, on ne sait pas très bien à qui. Devons-nous encore préciser en 2022 que ce n'est pas parce que c'est rock que c'est mieux, plus sain ou plus sincère ? L'histoire a même assez souvent montré le contraire et Mk2 en est un exemple retentissant.