1997 - Indo Live titre par titre


"C'étaient des concerts incroyables... Sans promo, sans titres à la radio, sans affiches."

Nicolas Sirchis, Un flirt sans fin, 2006

Les toutes premières images d'Indo Live montrent pourtant une passante bruxelloise devant une ribambelle d'affiches du Wax Tour. Si Wax resta en effet très confidentiel, Indo Live profita en revanche d'une importante publicité gérée par Une Musique, filiale de TF1.


Voir : 1996 - Wax


Si cette vidéo est une des plus vendues du groupe à ce jour, elle renferme un certain nombre de problèmes, visiblement très peu remarqués.

Nous nous contenterons de discuter le film du concert titre par titre, et vous laisserons le soin d'en tirer les conclusions que vous estimerez les meilleures. Les minutages correspondent aux vidéos de la chaîne YouTube d'Indochine.

***

Nicolas apparaît avec l'explosion de la musique d'Edward Scissorhands.


Mire-Live :

Le concert commence par des nappes de synthétiseur, suivies de la guitare de Xavier "Tox" Géronimi, connu notamment pour son travail avec Étienne Daho  : pour ceux du fond que ça intéresse, c'est lui qui tient la guitare sur Pop Satori et Pour nos vies martiennes... C'est lui la guitare de "Bleu comme toi", excusez du peu. 

Voir : Étienne Daho


Le visage de Nicolas est éclairé, ovation du public, il commence à chanter et le public répond positivement à ce morceau récent. Tout semble bien se passer jusqu'à "allez promener le chien" où le son change brusquement. Une nouvelle voix est en train de prendre le dessus sur celle que nous entendions jusqu'alors. C'est un Nicolas qui rechante en studio, en fait depuis le début du morceau.
 
2:58 : Confirmation à la fin du second refrain, où le "[hey hey !]" sonne très différemment. (Note : nous retranscrirons les éléments live [entre crochets] pour plus de lisibilité.)
 
3:09 : Le passage instrumental donne à entendre deux soli de guitare simultanés, conclus au vibrato.
 
Il y a deux guitaristes, nous direz-vous ? Allons, vous savez parfaitement que la guitare de Stéphane (qui ne comporte pas de vibrato) est coupée sur ce live, et qu'elle a été inaudible en façade plusieurs années, et que de toute façon on voit parfaitement ce dernier jouer des accords et non quelconque solo.

3:28 : "à faire un choix comme des acrobates" on voit Nicolas éloigner le micro alors que la voix sonne toujours.


Unisexe :

0:28 : Les onomatopées "[allez ! cha ! hou !]" sont live.

Cette fois on entend les deux Nicolas, celui sur scène et celui en studio, quasiment au même volume. On entend au début du deuxième couplet le Nicolas live se tromper dans les paroles, et le Nicolas studio les chanter correctement. Et avant le deuxième refrain à 2:07, le "rappelle toi la première foiiiiis" du Nicolas studio et le "[say !]" live se chevauchent.

Oui, à cette époque les technologies de modification des pistes vocales n'étaient pas aussi avancées qu'aujourd'hui : si on avait mal chanté le soir du concert, il fallait laisser tel quel ou tout refaire. Les exemples sont relativement nombreux, mais ici le montage est anormalement bâclé, et le mot est faible.
 

On le voit même à deux reprises chanter "attache-moiii" et s'éloigner du micro, alors que la voix continue de sonner. 

3:18 : "Iciiiiiiii[hey !]iiiii" 
 
3:25 : "nuit !" rajouté, Nicolas ne chante pas à l'image.

3:35 : "[juste ici pour rester zunis]" live, trop audible.

4:16 : "[Bonsoir tout l'monde ! Bienvenue sur le Wax Tour ! Est-ce que vous êtes prêts ? Vous êtes prêts ? Hey ! Sayyyyy !]", live évidemment. La différence de couleur entre les deux enregistrements saute aux oreilles.
 
Pour ceux qui savent faire un peu de son, sachez que si vous appliquez un effet de déphasage sur "Unisexe", vous shuntez la voix studio. Chose étrange, cette pirouette ne fonctionne que sur ce titre-là. Nous avions monté le résultat sur les images du live et l'avions posté sur Youtube, mais malheureusement la vidéo a été supprimée.

Stéphane, lui, gratte sa Mustang. Aucun son n'en sort, alors que le gros son de Tox remplit l'espace.


Les Tzars :

Nous savons dorénavant que le Nicolas qu'on entend n'est pas celui que l'on voit sur scène. Sa voix sonne très différemment du reste des pistes, ce qui rend la relativité de la synchronisation labiale encore plus perceptible et gênante.
 
1:48 : "[Woo !]" live
 
2:01 : "Les tyrans et leurs femmes ne sortent plus sans un garde du corps qui témoigne", les deux voix se chevauchent.
 
2:26 : Illusion que Stéphane joue ? Pas du tout, c'est le son de Tox.  

Juste après, un passage qui a été assez discuté par ailleurs : ce moment incroyable où Stéphane vient regarder son frère dans les yeux en le pointant du doigt, alors que ce dernier chante "et ses mauvaises fréquentations !".
 
"Les Tzars"
 
3:55 : On n'entend plus ici que le Nicolas studio, avec une réverbération marquée style "concert".
 
 
Trois Nuits par Semaine :
"Il faut bien être remplacé un jour... Cependant, j'ai remarqué que dans 'Trois Nuits par Semaine', le gimmick est souvent mal placé, et pas un ne le joue comme l'original. Le grand public ne s'en rend pas vraiment compte. C'est ce qui me fait grincer des dents, en souriant."

Dominique Nicolas, Platine, 2004

0:42 : "elle décidaiiiit" les deux voix se chevauchent très audiblement.

1:16 : "[Hep hep hep !]" live.

1:17 : Sur le plan large on voit Nicolas laisser chanter le refrain au public. Pourtant, on entend sa voix.

2:33 : "et je suis avec elle [hey !]"

2:51 : "mais bon dieu qu'elle est belle ! [...eeelle...] shhuayy !]"

4:07 : à l'image : "Trois nuits par semaine" / au son : "MAIS trois nuits par semaine", sur un gros plan de son visage.

de 4:48 à 5:40, tout ce qu'on entend est live. C'est un des rares moments du film où c'est le cas. 

6:06 : "[qu'elle est belle !...eeeeelle] shaayyy !"

7:05 : un accord fait par Stéphane à l'acoustique, audible.
 
 
La Main sur Vous :

Pourquoi ce choix horrible de télé filmée au caméscope ? Qu'y avait-il à cacher ? Possiblement, une coupe de cheveux étrange suite à un passage de serviette sur la tête.

Tendez l'oreille, on entend deux guitares lead sur toute la longueur du morceau, comme si l'ingé-son avait gardé une prise témoin. Pourquoi ?

La guitare acoustique, d'une propreté clinique, ne colle pas avec ce que joue Stéphane.


Les Silences de Juliette :

1:24 : Non, ce n'est toujours pas Stéphane que vous entendez à la guitare acoustique. Le son qu'on entend lorsqu'on le voit accompagner Nicolas sur "je t'écrirai tous les secrets que je sais" ne correspond ni à l'image, ni à un quelconque son live. Très plausiblement, plutôt Tox en studio.

2:51 : "On n'se quitteraaaaaaa[hey !]aaaa..."

4:51 : On voit et entend parfaitement que Tox est en train de jouer un solo, pourtant le gimmick de guitare qu'il jouait précédemment continue de tourner.

"Les Silences de Juliette"

Kissing my Song :

"[On va parler un peu de sexe !]", depuis assez régulier.

Stéphane absent de la scène au début, puis à la guitare acoustique... inaudible.

Vers 3:00 on entend un solo de guitare hurlant, qui ne semble pas venir de la guitare de Tox, puisqu'on entend aussi ses accords. Un overdub évident.


Satellite :

Stéphane ne bénéficie pas d'un décibel sur sa propre compo.  

1:45 : Nicolas chante "poser", comme le montrent ses lèvres à l'image, au lieu de "placer".

De 3:15 à 3:20 Nicolas chante autre chose en live, deux voix se chevauchent et ne correspondent pas.

3:50 : Les "[hiiiin]" et le "[AAAYAYAYA !]" sont live, dieu merci.

Énorme pain de Tox à 4:49.


Punishment Park :

Pilot semble au moins s'amuser.

1:52 : "son chemiiiiiiiii[teuh !]iiiiiiiin !"

2:08 : La note d'harmonica et le "Woo !" se chevauchent.

2:15 : Les poses "rock", si peu naturelles.

Des plans sur l'acoustique de Stéphane... Mais pas de son.

3:17 : "son chemiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii[hey hop say !]iiiiiiiiiin !"


Echo-Ruby :

Si l'on excepte la voix, c'est un morceau où tous les éléments sont live. Ça aurait presque collé si nous ne l'avions pas vu s'éloigner du micro à 2:55 pendant que le chant continue.

"Echo-Ruby"

Je n'embrasse pas :

1:34 : Ce soir-là, Nicolas a chanté le premier "je n'embrasse pas !", alors que le Nicolas studio choisit de le laisser au public... Sauf que le film le montre chanter au micro, et même assez franchement.

3:39 : Les beaux plans de la guitare de Stéphane, mais c'est Tox qu'on entend.

3:49 : Ici c'est le contraire : "je n'embrasse pas !" chanté en studio alors que le Nicolas live laissait chanter le public, comme on le voit parfaitement à l'image.

4:47 : "Un peu d'enviiii[shusayyy!]iiie..."

Les "oooooooohh" sont studio, entrecoupés de "[plus fort !]" et de "[say !]" live.


Drugstar :

Nicolas à la guitare avec des plans valorisants. C'est son morceau à lui !

Dimitri au saxo, qui rejoint Pilot pour des sons cuivrés. On entend mieux son saxophone vers 4:13 (il joue les notes graves). La retouche vocale est globalement propre.

"Drugstar"

Révolution :

Longue introduction festive pour cet autre morceau composé par Nicolas (toutefois absente du CD).

Tox très "edgien", et surtout la guitare acoustique audible de Stéphane ! Pilot reçoit une belle ovation du public pour sa présentation, à juste titre. Yann Cortella, ancien batteur pour Alain Bashung, ne vient absolument pas "de Grande Bretagne" mais simplement de Bretagne.

La présentation de Stéphane est en revanche virée au montage : "Le plus voyou !" à quoi ce dernier répondit en désignant son frère : "et lui, l'intolérable !". Pourquoi ce choix ?

À savoir que sur le CD, la choriste Tina Hersan est rajoutée et même créditée... Chose qui n'a tout de même pas été osée sur la vidéo.

À 5:34 on entend et voit très distinctement les strums (grattements sur sa guitare) de Nicolas, totalement arythmiques.

 
Des Fleurs pour Salinger :

Assez peu d'éléments live là-dessus. La grosse séquence basse rapide est un ajout studio.

1:04 : Entrée d'un overdub de guitare. On serait tenté de croire que c'est Stéphane, mais cela ne correspond ni à ce qu'on voit à l'image, ni à un son live. La preuve par ailleurs : à 3:15 il s'arrête, tape dans les mains, et on entend quand même la guitare.

À la toute fin, le micro tombe...


Canary Bay :

...C'est pour cela qu'on le voit cabossé.

3:00 : Nous sommes à la recherche d'un spécialiste en lecture labiale.

4:39 : "comme elles voulaient" à l'image, "quand elles voulaient" au son...

5:42 : Un moment assez commenté par ailleurs où Stéphane semble se plaindre, comme d'un problème de son. (tu m'étonnes)

6:15 : On entend les deux Nicolas au même volume.

6:28 : "vivaient" à l'image, "s'aimaient" au son.

6:38 : Le Nicolas studio chante "bay !" et le Nicolas live chante "[baaaaaaayyyyyyyyyyyyyy !]"


Monte Cristo :

"C'est l'heure où..." : on entend bien les deux Nicolas.
 
Y avait-il une blague entre les jumeaux avec "les plus voyous" ? On voit Stéphane se montrer du pouce.


2:08 : Le "[oh !]" est live.

2:23 : "Où tu voulaiiiis !" : On voit Nicolas qui ne chante plus mais la voix continue de sonner.

"Monte Cristo"

3:07 : Nicolas repart trop tôt, les musiciens doivent se caler sur lui.

4:22 : "Chay chayyy" live, "Monte Cristooo" studio.

Le morceau se termine sur un fondu au noir.


Mes regrets/3e Sexe :

Pourquoi ce fondu ? Parce que "La sécheresse du Mékong". Nous vous rappelons que contrairement à ce qui est annoncé, le concert n'est pas intégral.

En piano/voix, la tambouille live/studio s'entend forcément moins.

0:52 : Le deuxième "à quoi bon" semble rajouté, on voit Nicolas baisser la tête.

0:59 : "[VIIIIIE]" on entend les deux Nicolas.

1:25 : Sa bouche ne prononce clairement pas "je dis des mots stupides". Une bafouille ? 

3:09 : "Des tenues charmantes" on entend deux "t"

4:07 : "Une fille au masculin"... Mais on voit clairement sur le film que les mots "au masculin" ne sont pas chantés.

5:36 : "Un garçon au féminin / [Vas-y à toi say]", deux sources vocales vraiment très différentes. Tout est live jusqu'à la fin du morceau... Et on entend parfaitement la différence de son, flagrante.


Tes Yeux Noirs :

Pourquoi de nouveau un fondu ? Ici nous n'avons pas la réponse...

0:43 : Un son de guitare acoustique qui tourne, et ne correspond pas à ce que fait Stéphane.

Le sifflement qui retentit prévient un malaise dans les premiers rangs. Un autre malaise survient plus tard, et le morceau se déroule dans une ambiance globalement mauvaise. Nicolas s'approche avec une bouteille d'eau à 3:38 mais prend son temps, Stéphane le presse, ce qui semble l'agacer.

Un nouveau fondu...


L'Aventurier :

On voit une fille dans les bras de Nicolas... Mais sur quel titre ? Réponse, "Peter Pan", et cela explique le fondu précédent.

On remarque à 1:35 que Nicolas est aux côtés de Jean-Pierre Pilot. Oui, sur cette tournée il avait l'habitude de jouer l'intro de "L'Aventurier" avec son claviériste. Il n'était en revanche pas ou peu audible. Nous ne savons pas pourquoi ce moment n'est pas montré sur le film.

Comme Stéphane, que nous n'entendons toujours pas. Tox est en revanche gonflé aux hormones, on dirait qu'ils sont trois guitaristes à jouer le riff de "L'Aventurier".

à 4:25, le "[chhay]" est bien sûr live, le "[saaah]" à 4:41 également.

"L'Aventurier"

5:15 : Difficile bien sûr d'interpréter une émotion sur une seule image au sein d'un film si complexe, mais Stéphane semble au bout du rouleau.

Sinon, le Nicolas studio chante correctement.

***

Au terme de ce film, nous sommes embarrassés et perplexes devant tant de questions laissées sans réponses. Comment se fait-il que personne n'ait rien remarqué ou rien dit ? Comment l'ingénieur du son Stéphane Kijek a t-il pu rendre une copie si bâclée ? Est-ce Nicolas, crédité au mastering mais pas au mixage (...?) qui a exigé ces choix incompréhensibles ? Et quid de Stéphane ?

1997

Comment se peut-il qu'Indo Live se soit aussi bien vendu, et soit encore à ce jour si apprécié des fans ? Comment peut-on vendre un tel produit dans le commerce, contre de l'argent ?
 
Un enregistrement pirate audio et vidéo existe pourtant, jalousement gardé par quelques cerbères qui ne souhaitent pas que ce trésor devienne accessible à des "fans de seconde zone" et/ou ne veulent pas faire de tort à Nicolas. Il serait pourtant immensément intéressant de monter l'audio du bootleg sur les images du film. Les fans ne seraient-ils pas intéressés, ou ne verraient-ils pas l'intérêt ? Ce DVD leur suffit-il, vraiment ? Aurions-nous tort de préférer le vrai au faux ? 
"C'est le show tel quel, vraiment sans trucage euh, de la tournée d'Indochine."

Nicolas Sirchis, Le Mag MCM, 1997

Bien sûr, tout à fait.


Un pseudo-live qui aurait selon toute logique dû torpiller Indochine. Mais bien au contraire il les a relancés - un autre mystère -  et seulement deux ans plus tard sortait le très respecté Dancetaria (1999).

Voir : 1999 - Dancetaria

"La remontée avait commencé avec 'Indolive', une compilation déguisée bien matraquée... C'est logique : un titre locomotive, le rouleau compresseur marketing mis par Sony, une tournée triomphale, un Bercy..."
Dominique Nicolas, Platine, 2004
 
Le titre locomotive dont parle Dominique était bien sûr "L'Aventurier", single extrait pour promouvoir le film. C'est ce titre en single edit qui sera joué lors de télévisions surréalistes, en playback.




Admirez Stéphane Sirchis jouer en playback sur un titre dans lequel on ne l'entend pas.
"Comment réussir à chroniquer Indo Live sans vexer plein de gens, Indochine, leurs amis, leur maison de disques, leur public ? C'est impossible, mais l'important est d'avoir essayé."

Jérôme Soligny, Rock & Folk, 1997


En 2004, Olivier Gérard expliqua le son fouillis de 3.6.3. par les mots suivants :

"Le public est habitué à entendre du faux live où tout est enregistré avec un son magnifique de studio. Ce n'était pas ma volonté de sortir ce genre de disque douteux." 
Olivier Gérard in Insolence Rock, Sébastien Michaud, Camion Blanc, 2004


Voir aussi sur le blog :

1996 - Wax

Nicolas et la guitare

Révisionnisme et malentendus

 

Annexes :

Reportage d'MCM à l'Ancienne Belgique le soir d'Indo Live. On peut y voir des images du concert, filmées depuis un autre angle et avec bien sûr le son en direct. Forcément, cela ne ressemble à rien de ce qui est montré dans la vidéo officielle, c'est même assez catastrophique.



Nicolas et Stéphane Sirchis, lors de la remise du disque d'or par Jean-Pierre Foucault, 1997

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